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La croissance mondiale d’une décennie à l’autre

Cette première note propose un cadrage des points clefs de l’environnement macroéconomique international, complété par une présentation de scénarios pour les économies avancées, les pays émergents et la croissance mondiale.
ENJEUX
DÉBAT &
CONTRIBUTIONS
SYNTHÈSES DES DÉBATS
Résumé

La croissance mondiale aura connu un ralentissement important sur la décennie 2007-2016 et plusieurs facteurs devraient continuer à peser en ce sens à partir de 2017.

Dans les économies avancées, tout d’abord, le retour aux tendances antérieures à 2008 ne doit pas être surestimé. L’effet de la récession de 2008-2009 ayant été largement absorbé, sauf dans la zone euro, la perspective d’un rebond cyclique est limitée. Quant à la croissance potentielle, elle sera très probablement plus faible que sur la décennie qui a précédé la crise financière.

S’agissant des économies émergentes, elles ont bénéficié de facteurs exceptionnellement favorables – croissance chinoise maintenue à des niveaux artificiellement élevés, conditions financières globalement accommodantes, cycle des matières premières porteur – et leur contribution à la croissance mondiale sera probablement revue à la baisse. Elles resteront un facteur de dynamisme, mais avec une vigueur moindre qu’au cours de la décennie 2007-2016.

À ces évolutions anticipées s’ajoutent des incertitudes qui pourraient jouer, tant à la baisse qu’à la hausse, sur les perspectives macroéconomiques de la décennie 2017-2027 : aléas quant au rythme de progression de la productivité, risque d’excès d’épargne persistant, possibilité que certaines économies émergentes subissent un ralentissement brutal de leur croissance ou au contraire connaissent un rattrapage plus rapide.

2007-2016 : l’affaiblissement des économies avancées

2017 marquera les dix ans de la crise économique et financière qui a frappé l’économie mondiale en 2008- 2009. Au cours de cette décennie, la croissance mondiale aura été en moyenne de 3,5 % par an, soit un demi- point en dessous du rythme enregistré pendant la décennie 1997-2006. Elle aura été caractérisée par un basculement des moteurs de la croissance des pays développés vers les émergents (graphique 2). Les premiers n’ont connu qu’une croissance moyenne de 1,1 % sur la décennie, contre 2,5 % sur les dix années précédentes, alors que la croissance dans les pays émergents est restée quasi inchangée à 5,5 % par an[3].

Dans les économies avancées, la crise de 2008-2009 aura été historique par sa durée et son coût. Avec l’effondrement de la croissance, le taux de chômage des économies avancées a augmenté de plus de 2 points en 2009 de 6 % à 8 %, et n’a entamé de réelle décrue qu’en 2013 (graphique 3). Parmi les économies avancées, c’est clairement la zone euro qui a traversé la récession la plus profonde et la plus longue. Sa croissance sur la décennie n’aura été que de 0,5 %, contre 2,3 % sur la décennie précédente. C’est là aussi où le taux de chômage a le plus augmenté, passant de 8 % avant la crise à 13 % en 2013 et restant proche des 11 % en 2015.

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17-27-Croissance_mondiale---Graphiques-4La réaction des économies émergentes au choc de 2008- 2009 – qui ne les avait touchées qu’indirectement – a été bien moins négative. Dès 2010, elles ont bénéficié d’une forte croissance, portée notamment par des efforts vigoureux de relance, des conditions financières très favorables, un afflux massif de capitaux étrangers et la hausse du prix des matières premières. Elles ont tiré l’économie mondiale sur la décennie 2007-2016 et ont été à l’origine de plus de 80 % de la croissance globale. Ainsi cette période aura consacré le basculement de l’équilibre économique du monde vers les économies émergentes, qui représentent désormais plus de 59 % du PIB mondial (aux taux de change de parité de pouvoir d’achat – PPA) contre moins de 50 % dix ans plus tôt (graphique 4). Toutefois ces économies connaissent depuis mi-2015 un ralentissement marqué qui se traduit par une moindre contribution à la croissance mondiale (2,5 points sur 2015-2016 selon le FMI, contre 3,1 points de 2007 à 2014).

Plus qu’à un passage de témoin, on assiste à une multiplication des pays qui comptent dans l’économie mondiale. Les centres de croissance de la demande et de la production se sont diversifiés. Les turbulences qui ont marqué ces dix années ont également révélé une interdépendance accrue des économies, notamment via les flux de capitaux bruts[4] et l’importance des chaînes de valeur internationales[5]. Désormais, nul pays n’est à l’abri des conséquences des soubresauts économiques qui surviennent dans les autres économies de la planète.

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3. Les chiffres retenus pour la décennie 2007-2016 reprennent les prévisions du FMI pour les années 2015 et 2016 (mise à jour du World Economic Outlook, janvier 2016).

4. L’accroissement des flux de capitaux entre pays a induit une forte interdépendance financière, notamment à travers un cycle financier global. Voir Rey H. (2015), “Dilemma not Trilemma: The Global Financial Cycle and Monetary Policy Independence”, NBER Working Papers No. 21162, mai.

5. Baldwin R. (2013), “Trade and Industrialization after Globalization’s Second Unbundling: How Building and Joining a Supply Chain Are Different and Why It Matters”, in Feenstra R.C. et Taylor A.M. (Eds), Globalization in an Age of Crisis: Multilateral Economic Cooperation in the Twenty-First Century, University of Chicago Press.

 

Les perspectives pour 2017-2027

La logique économique voudrait qu’après une décennie décevante, la croissance mondiale accélère pour rejoindre son potentiel et comble le retard accumulé. On attend beaucoup du rebond des économies avancées après une baisse de régime qui s’est prolongée, du recul durable du prix des matières premières, de la poursuite du processus de rattrapage par les économies émergentes, du dynamisme des économies africaines ou de l’Inde. Chacun de ces facteurs a cependant ses limites évidentes et il serait illusoire d’attendre que les moteurs de la croissance repartent automatiquement avec vigueur.

Pas de rebond d’ampleur dans les économies avancées

Les travaux empiriques ont montré que les crises bancaires d’ampleur systémique ont un coût et une durée très importants pour l’activité et le chômage[6]. Cela explique en grande partie les performances macroéconomiques si décevantes réalisées sur la décennie par les économies avancées. Les États-Unis et le Japon auront dû attendre six ans pour voir leur niveau de PIB par tête revenir à ce qu’il était avant la crise, le Royaume- Uni et la France (qui y arrive à peine) huit ans (graphique 5). L’Espagne ou l’Italie sont encore loin d’avoir récupéré leur niveau de vie antérieur à 2008. Ainsi la Grande Récession aura constitué, à l’instar de la Grande Dépression des années 1930, la crise la plus profonde et la plus longue de l’histoire économique moderne.

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Cependant, le rebond à attendre dans les années à venir sera limité. D’une part, il est certain que la crise a induit une perte définitive de PIB potentiel en niveau. Cela limite la possibilité de voir l’activité rebondir de manière vigoureuse et explique pourquoi les output gaps[7] seront en grande partie refermés dès 2017. La zone euro, où la crise a été plus profonde qu’ailleurs, notamment du fait d’une double récession en 2009 puis en 2012-2013, et où une reprise sans grande vigueur n’a débuté qu’en 2014, constitue une exception. Avec un output gap probablement plus creusé qu’ailleurs (hormis l’Allemagne), les perspectives de rebond en début de décennie y sont légèrement plus élevées (graphique 6).

Par ailleurs, outre la perte de PIB en niveau, la crise a probablement induit un fléchissement de la croissance potentielle (graphique 6). En dehors même de l’influence de facteurs comme le vieillissement, les niveaux élevés d’endettement et les inégalités (voir ci-après), l’ampleur et la durée de la Grande Récession ont pu déclencher une perte supplémentaire de croissance potentielle (effets d’hystérèse) à travers une moindre accumulation de capital humain – en lien avec l’augmentation du chômage de longue durée – et une détérioration de la qualité du stock de capital du fait d’un sous-investissement prolongé[8].

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Prix des matières premières : le gros du choc déjà absorbé ?

La très forte baisse du prix du pétrole depuis mi-2014 – passé de plus de 110 dollars le baril en juin 2014 à quasiment 30 dollars début 2016 (graphique 7) – résulte à la fois du ralentissement de la croissance dans les pays émergents et du développement de sources alternatives d’énergie (pétrole et gaz de schiste, énergies renouvelables). Cette baisse constitue – toutes choses égales par ailleurs – un choc positif de grande ampleur pour l’économie mondiale, notamment pour les économies avancées qui sont quasiment toutes importatrices nettes d’hydrocarbures[9].

En juillet 2015, le FMI estimait que la baisse du prix du pétrole observée sur la seconde moitié de l’année 2014 (recul de 40 %) aurait un effet positif sur le PIB mondial compris entre 0,5 % et 1 % sur deux ans[10]. En extrapolant ce résultat à la nouvelle baisse des prix observée depuis début 2015, l’effet total pourrait être de l’ordre de 1 % à 1,5 % de PIB mondial sur deux ans. Toutefois, la chute de revenu induite pour les pays ou les grandes entreprises producteurs pourrait aussi entraîner des dérèglements financiers non négligeables.

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À l’horizon 2017, l’effet sur la croissance mondiale devrait être en grande partie absorbé car c’est avant tout la variation du prix du pétrole qui a un impact sur la croissance. Quelles évolutions de prix peut-on attendre par la suite ? Plusieurs facteurs structurels à l’origine de cette baisse devraient perdurer dans les années à venir, laissant penser à un maintien des prix à des niveaux bas. Du côté de la demande, le ralentissement des économies émergentes devrait se poursuivre. De même, l’exploitation continue du pétrole de schiste aux États-Unis, qui s’est révélée plus résiliente qu’escompté à la baisse des prix, devrait continuer de soutenir l’offre mondiale. Toutefois à moins de 30 dollars le baril aujourd’hui, la possibilité d’un contrechoc pétrolier ne peut totalement être écartée. L’arrêt de l’investissement dans l’exploration de nouveaux gisements ou la possibilité d’un événement géopolitique majeur au Moyen-Orient pourrait déclencher un tel mouvement.

Une contribution moindre des économies émergentes à la croissance mondiale

Alors que la décennie 2007-2016 a vu la croissance mondiale être très largement tirée par les économies émergentes, ce moteur pourrait s’enrayer au cours de la décennie 2017-2027.

Premier risque de freinage, la croissance potentielle de certaines grandes économies émergentes qui ont connu une expansion très soutenue va ralentir de manière importante. C’est déjà le cas pour l’économie chinoise sous l’effet du rééquilibrage de son modèle de développement. Selon certaines estimations[11], et sans même mettre en cause la réalité des chiffres publiés, la croissance potentielle chinoise devrait se réduire à 5,5 % dès 2017 et être proche de 4,5 % en 2027. Malgré le poids de la Chine dans le PIB mondial qui ne cessera de progresser (pour être supérieur à 20 % en moyenne sur la décennie 2017-2026[12]), ce ralentissement devrait retrancher annuellement 0,3 point environ à la croissance globale[13]. Selon une étude récente du FMI[14], certaines économies émergentes comme le Mexique, le Brésil et la Turquie verront leur croissance potentielle se réduire dans les prochaines années du fait d’une moindre progression de leur population active et de leur stock de capital.

Dans un tel contexte, d’autres régions seront-elles en mesure de prendre le relais ? L’Inde et l’Afrique combinent toutes deux une trajectoire démographique fortement dynamique et des perspectives de rattrapage de productivité très importantes. Toutefois, leur poids dans le PIB mondial à l’horizon 2017 restera inférieur à celui de la Chine en 2007[15]. En outre, les économies d’Afrique sub-saharienne sont souvent dépendantes du marché des matières premières et souffrent encore d’un déficit important en capital humain et d’un cadre institutionnel fragile, ce qui limitera inévitablement leur trajectoire de croissance à court terme. De même, le maintien d’une croissance élevée en Inde reste conditionné à la mise en oeuvre de réformes structurelles qui libéreront les forces productives du pays.

Par ailleurs, les économies émergentes ont bénéficié d’un double cycle – financier et prix des matières premières – qui, depuis 2007, leur a été particulièrement favorable. L’endettement, privé comme public, de nombre d’entre elles a fortement augmenté (graphique 8) sous l’effet des politiques monétaires expansionnistes des banques centrales et des afflux de capitaux massifs qui en ont découlé. Mais avec le resserrement graduel des politiques monétaires dans les économies avancées, ce cycle financier devrait s’inverser et donner lieu à une phase de désendettement potentiellement coûteuse pour la croissance. Alors qu’un peu plus du tiers de la croissance réalisée dans les pays émergents était issu des économies exportatrices de matières premières (graphique 8), le retournement observé des prix depuis mi-2014 et l’effet récessif induit devraient lourdement peser sur la croissance du bloc émergent, comme cela a déjà été le cas en 2015.

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Toutefois, la décennie à venir sera marquée par un accroissement de grande ampleur de la classe moyenne mondiale. Un travail de projection[16] montre que le nombre de personnes dans le monde vivant avec plus de 10 000 dollars PPA par an va passer d’un peu plus de 1 milliard en 2017 à presque 2 milliards en 2027 (graphique 9). Plus des 4/5 de cette augmentation viendront des économies émergentes, notamment de l’Asie, et ce de manière assez peu sensible au ralentissement des taux de croissance. L’essor de cette nouvelle classe moyenne est une opportunité pour les entreprises des économies avancées qui sont déjà spécialisées dans la production des biens et services consommés par cette tranche de la population.

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6. Reinhart C.M. et Rogoff K.S. (2014), “Recovery from Financial Crises: Evidence from 100 Episodes”, American Economic Review 104(5).

7. Écart entre le PIB effectif et le PIB potentiel.

8. Ball L.M. (2014), “Long-Term Damage from the Great Recession in OECD Countries”, NBER Working Papers No. 20185.

9. Les baisses de prix libèrent du pouvoir d’achat et des capacités d’investissement dans les pays importateurs nets qui ont une propension à consommer et à investir plus élevée que les pays exportateurs.

10. Husain A.M. et al. (2015), “Global Implications of Lower Oil Prices”, IMF Staff Discussion Note, SDN/15/15, juillet.

11. Albert M., Jude C. et Rebillard C. (2015), “The Long Landing Scenario: Rebalancing from Overinvestment and Excessive Credit Growth, and Implications for Potential Growth in China”, Working Paper, Banque de France, février.

12. Sur la base de la projection réalisée par Fouré J., Bénassy-Quéré A. et Fontagné L. (2012), “The Great Shift: Macroeconomic Projections for the World Economy at the 2050 Horizon”, CEPII Working Paper 2012- 03, février.

13. La contribution moyenne de la Chine à la croissance mondiale a été de 1,4 % sur la décennie 2007-2016. Avec une croissance annuelle moyenne de 5 % et un poids moyen de 21 % sur la décennie, la contribution serait de 1,1 %, soit 0,3 % de moins que par le passé.

14. FMI (2015), “Where are we Headed? Perspectives on Potential Output”, World Economic Outlook, chapitre 3, avril.

15. L’Afrique sub-saharienne et l’Inde devraient peser respectivement 2 % et 7 % du PIB mondial en PPA à l’horizon 2017, contre 11 % pour la Chine en 2007.

Les freins structurels dans les économies avancées

Nombre de freins structurels déjà à l’oeuvre vont peser sur la croissance, voire amplifier leurs effets.

Un vieillissement accéléré

Selon les projections réalisées par les Nations unies, alors que l’âge moyen d’un habitant de la planète était de 25 ans en 2000, il sera de presque 33 ans à la fin de la décennie 2020 (graphique ). Dans les économies avancées, le vieillissement s’accélère de manière brutale à partir de 2015, avec une part de la population de plus de 60 ans qui passera de 20 % à 27 % à horizon 2030 et un ratio de dépendance (rapport des moins de 20 ans et des plus de 65 ans aux 20-64 ans) qui passera d’un peu plus de 60 % à presque 80 %. Dans les pays à revenu intermédiaire, l’évolution sera de même nature et quasi-simultanée avec cependant une hausse moins forte du ratio de dépendance.

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Le vieillissement de la population exercera d’abord un impact négatif sur la croissance mondiale du fait d’une progression moins soutenue de la population active. De manière automatique, le vieillissement, lorsqu’il se traduit par une croissance ralentie du nombre d’actifs, réduit celle du PIB agrégé, mais aussi celle du PIB par tête. Par ailleurs, les études empiriques[17] semblent indiquer une relation en U inversé entre l’âge moyen de la population active et la productivité d’une économie : une population active trop inexpérimentée ou trop âgée nuit à la productivité. Ainsi, le vieillissement pèsera sur la productivité des pays avancés mais exercera un effet positif sur les pays émergents qui se situent sur la première partie de cette courbe en U inversé.

Alors que l’effet du vieillissement sera spécifique à chaque pays, les données disponibles tendent à montrer que certaines économies avancées, notamment l’Allemagne, l’Espagne et l’Italie, devraient affronter le choc précisément dans les quinze années à venir. Selon certaines études, le vieillissement entraînerait un ralentissement du PIB par tête allant jusqu’à 0,5 % par an dans les pays où cette dynamique serait plus marquée au cours des prochaines années[18]. Par ailleurs, le poids du vieillissement sur la croissance dépendra de la manière dont le choc sera géré en termes de finances publiques. S’il donne lieu à des augmentations de la fiscalité ou de la dette publique et non à des mesures plus structurelles comme l’allongement de la durée de la vie professionnelle, il affectera davantage la croissance.

Le poids de l’endettement

Les niveaux d’endettement privé des entreprises et des ménages ont crû presque partout depuis le milieu des années 1990 et de manière clairement excessive au début de la décennie 2000, en lien notamment avec la bulle immobilière et la forte dérégulation financière qui ont débuté dans les années 1990. La crise a elle-même eu pour conséquence d’accroître fortement l’endettement public. Au total, le niveau d’endettement global ne s’est réduit dans aucune économie avancée. Si les États-Unis ou le Royaume-Uni ont en partie réduit leur endettement privé (ménages et sociétés non financières), cette réduction n’a pas compensé l’augmentation de la dette publique. La zone euro et le Japon n’ont que très peu réduit leur niveau d’endettement privé depuis la crise alors que leur dette publique a fortement augmenté sur cette période (graphique 11).

Les travaux disponibles montrent que des niveaux élevés d’endettement, public comme privé, constituent un frein parfois substantiel à la croissance, notamment lorsque l’endettement est simultanément important dans différents secteurs (ménages, entreprises, banques, sphère publique)[19]. Un stock de dette élevé pèse sur la croissance car les paiements d’intérêts qu’il induit opèrent un transfert de revenu des agents qui ont une propension marginale à consommer et à investir forte (les emprunteurs) vers ceux à propension faible (les créditeurs). En termes de stabilité financière, un niveau d’endettement élevé expose le secteur bancaire à un risque bilanciel accru, ce qui peut être défavorable au financement de l’économie. Enfin, ces effets négatifs sont démultipliés lors des phases de désendettement car une partie encore plus importante des revenus est consacrée au remboursement de la dette, cela étant d’autant plus problématique lorsque plusieurs secteurs se désendettent simultanément[20].

Une recherche réalisée en 2011 par la Banque des règlements internationaux (BRI) a estimé que l’endettement privé pèse sur la croissance lorsque les ratios de dette dépassent 85 % du PIB pour les ménages et 90 % pour les sociétés non financières. Ainsi, la zone euro et le Japon, avec des niveaux d’endettement de leurs entreprises non financières supérieurs à ces seuils, se situent dans la zone à risque. Dans une étude publiée en 2013[21], le FMI a évalué qu’une réduction significative de l’endettement privé peut coûter jusqu’à 1 % de croissance annuelle, notamment si plusieurs secteurs se désendettent simultanément.

Le niveau élevé des inégalités

Les inégalités de revenus ont substantiellement augmenté dans les économies avancées depuis le milieu des années 1980, sans que la crise modifie profondément cette évolution (graphique 12). Cette tendance a été particulièrement marquée aux États-Unis alors même que la distribution des revenus était déjà très inégalitaire dans les années 1980[22]. Elle l’a aussi été dans des économies partant de niveaux d’inégalité plus faibles comme la Suède, la Finlande ou l’Allemagne. Cette augmentation des inégalités sur l’ensemble de la distribution des revenus a également coïncidé avec une captation croissante des revenus par les 1 % les plus riches et avec une augmentation des inégalités de patrimoine.

De nombreux travaux empiriques récents montrent que tant un niveau élevé qu’une augmentation des inégalités réduisent le niveau et la soutenabilité de la croissance du PIB dans les économies avancées[23].

Des inégalités excessives ou trop dynamiques pèsent sur l’investissement en capital humain des plus pauvres, engendrent une instabilité politique qui freine l’investissement et réduisent le consensus social nécessaire aux réformes favorables à la croissance. Ces études soulignent toutefois que l’effet des inégalités sur la croissance diffère selon leur nature : alors que le creusement des inégalités sur le bas de la distribution des revenus a clairement un effet négatif, l’impact des inégalités extrêmes, celles du haut de la distribution (les 1 %), est moins évident lorsqu’il reflète une dynamique entrepreneuriale d’innovation[24]. Selon l’OCDE[25], le maintien des inégalités au niveau actuel a un coût non négligeable pour la croissance dans les économies avancées, de l’ordre de 0,2 % à 0,3 % par an.

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16. Sode A. (2014), « Demain, quelle mondialisation ? », Trésor-Éco, n° 128, mai.

17. Aubert P. et Crépon B. (2004), « La productivité des salariés âgés : une tentative d’estimation », Économie et Statistique, n° 368, avril.

18. Voir Feyrer J. (2007), “Demographics and Productivity”, Review of Economics and Statistics, février ; Werding M. (2008), “Ageing and Productivity Growth: Are There Macro-level Cohort Effects of Human Capital?”, CESifo Working Paper, 30 janvier.

19. Cecchetti S.G., Mohanty M.S. et Zampolli F. (2011), “The Real Effects of Debt”, BIS Working Papers 352.

20. Eggertson G.B. et Krugman P. (2012), “Debt, Deleveraging, and the Liquidity Trap: A Fisher-Minsky-Koo Approach”, The Quarterly Journal of Economics 127-3, 14 juin.

21. Bornhorst F. et Ruiz-Arranz M. (2013), “The Perils of Private-Sector Deleveraging in the Eurozone”, 10 novembre, VOX CEPR’s Policy Portal.

22. Marguerit D. (2016), « Classe moyenne : un Américain sur deux, deux Français sur trois », La Note d’analyse, n° 41, février, France Stratégie.

23. L’effet des inégalités sur la croissance ne serait pas identique selon le niveau de développement du pays : plutôt favorable à la croissance dans les économies à bas revenus et défavorable dans les économies à hauts revenus. Voir Brueckner M. et Lederman D. (2015), “Effects of Income Inequality on Aggregate Output”, World Bank Policy Discussion Paper 7317 ; Ostry J.D., Berg A. et Tsangarides G.D. (2014), “Redistribution, Inequality, and Growth”, IMF Staff Discussion Note SDN/14/02, février.

24. Aghion P., Akcigit U., Bergeaud A., Blundell R. et Hemous D. (2015),”Innovation and Top Income Inequality”, NBER Working Papers No 21247.

25. Cingano F. (2014), “Trends in Income Inequality and its Impact on Economic Growth”, OECD Social, Employment and Migration Working Papers No 163.

De fortes incertitudes

Un déclin durable de la productivité dans les économies avancées ?

La productivité du travail, principal moteur de la croissance à long terme, connaît un ralentissement marqué depuis le milieu des années 2000[26] (graphique 13). Après la forte progression de la productivité qui a caractérisé l’après-guerre, du fait que la plupart des économies ont rattrapé les États-Unis, un premier ralentissement s’est produit au milieu des années 1970 mais la croissance de la productivité est restée à des niveaux élevés (autour de 2 %). Depuis le milieu des années 2000, le ralentissement est plus prononcé et se généralise : à partir de 2008, la productivité du travail a ralenti quasiment partout même si, pour diverses raisons[27], certaines économies (Espagne, Allemagne, États-Unis) s’en tirent mieux que d’autres (Royaume-Uni, Italie, France, Japon).

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Les travaux récents sur les évolutions futures de la productivité sont entourés d’une très forte incertitude[28]. Si pour certains techno-optimistes, les innovations en cours susciteront une nouvelle vague de hausse de la productivité, force est de constater que depuis vingt ans le progrès technique, bien réel dans certains secteurs, ne produit pas de véritable accélération de la croissance au niveau agrégé. Nombre d’études tentent d’identifier l’origine du ralentissement observé – problème de mesure, de diffusion, d’allocation, du niveau de l’investissement…– sans pour autant être capables d’apporter une réponse et surtout de prédire si le ralentissement est temporaire ou permanent.

Certaines économies émergentes victimes de la trappe à revenu intermédiaire ?

Après deux décennies de très forte croissance, il ne faut pas exclure que le phénomène de rattrapage qui a caractérisé certaines économies émergentes se grippe. En effet, une fois atteint un stade de développement, ces économies ont une probabilité plus forte de connaître un ralentissement sensible de leur croissance voire une phase de stagnation prolongée, c’est-à-dire de tomber dans ce que les économistes appellent la trappe à revenu intermédiaire[29].

La fin de la transition industrielle, la nécessité de faire évoluer le cadre institutionnel, les moindres opportunités de diffusion du progrès technique en provenance des économies étrangères (dont la part la plus aisément accessible a déjà été adoptée) sont autant de facteurs qui peuvent expliquer ce ralentissement.

La Chine, l’Indonésie, le Brésil, l’Égypte et l’Afrique du Sud se trouvent dans l’intervalle où se concentre le risque de « trappe à revenu intermédiaire » (entre 10 000 et 15 000 dollars PPA). L’Indonésie, la Chine et, dans une moindre mesure, l’Égypte ont connu des taux de croissance rapide sur la décennie 2007-2016 (tableau 1 ).

Ces pays sont particulièrement exposés à un ralentissement brutal de leur croissance. Quel pourrait être le coût d’un tel ralentissement pour l’économie mondiale ? En retenant une hypothèse de réduction de la croissance de ces économies de 2 points par an, et au vu de leur poids attendu dans le PIB mondial sur 2017-2026 (qui serait dans un tel scénario environ de 20 %), la perte pour la croissance mondiale serait de l’ordre de 0,4 point par an sur la décennie, sans tenir compte de l’impact en retour sur la croissance des autres pays de la planète. C’est un effet de premier tour tout à fait conséquent, qui pourrait être démultiplié via les effets induits de spillovers.

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Vers un excès d’épargne prolongé et une inflation durablement basse ?

Depuis trente ans, les taux d’intérêt mondiaux ont connu une baisse quasi constante et très importante (graphique 14). Alors que les taux à dix ans dans les économies avancées étaient de l’ordre de 8 % dans les années 1990, ils sont désormais sous la barre des 2 %. L’inflation n’ayant pas connu une telle baisse sur la période, cela implique un recul très sensible des taux d’intérêt réels.

Cette baisse tendancielle du taux d’intérêt réel mondial est, sur la période récente, difficile à séparer de l’incidence des politiques d’assouplissement quantitatif décidées par les banques centrales. Sur une période plus longue cependant, il semble qu’elle doive être attribuée à des facteurs non monétaires. La difficulté des banques centrales à faire remonter le taux d’inflation est d’ailleurs elle-même accentuée par la baisse du taux d’intérêt mondial d’équilibre.

Cette évolution pourrait être le signe d’un excès d’épargne global[30]. Il est possible en effet qu’une quantité croissante de la richesse produite soit épargnée (du fait notamment du niveau des inégalités dans les pays avancés et des taux d’épargne élevés dans les pays émergents) et que cette épargne se dirige prioritairement vers des produits financiers sans risque, tandis que se raréfie la demande de capital pour des investissements dans les activités productives et innovantes.

Ce dernier phénomène pourrait, dans les années à venir, être amplifié par l’essor d’une économie du partage peu gourmande en capital nouveau. L’ampleur de ces deux phénomènes serait telle qu’elle plongerait les économies avancées dans un régime de croissance et de taux d’intérêt durablement bas, sans investissement ni inflation. C’est l’hypothèse de la stagnation séculaire avancée en 2014 par Lawrence Summers.

Dans un tel environnement, le taux d’intérêt qui permettrait de réduire l’épargne et d’augmenter l’investissement productif – de retrouver un niveau de croissance élevé – serait significativement négatif et par conséquent inatteignable. Le principal risque d’un tel équilibre est qu’il s’auto-entretienne, la baisse du taux réel nourrissant celle de l’activité et de l’inflation qui, à son tour, entraînerait un renchérissement des taux réels. Un tel risque pourrait, à l’échelle des économies avancées, provoquer une période de stagnation durable, à l’instar de celle que traverse le Japon depuis la fin des années 1980.

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26. Sode A. (2016), « Comprendre le ralentissement de la productivité en France », La Note d’analyse, n°38, janvier, France Stratégie.

27. Les gains de productivité élevés en Espagne s’expliquent avant tout par des effets de composition liés à l’explosion de la bulle immobilière, alors qu’en Allemagne ils sont plus équilibrés sur l’ensemble des secteurs.

28. Voir OECD (2015), The Future of Productivity, report.

29. Eichengreen B., Park D. et Shin K. (2013), “Growth Slowdowns Redux: New Evidence on the Middle-Income Trap”, NBER Working Papers No 18673 ; Pritchett L. et Summers L.H. (2014), “Asiaphoria Meets Regression to the Mean”, NBER Working Papers No 20573.

Les risques géopolitiques

La réflexion sur les perspectives économiques ne consacre généralement pas beaucoup d’attention aux facteurs géopolitiques. De fortes interactions se sont certes manifestées au cours des dernières décennies : les conflits au Proche-Orient ont provoqué les chocs pétroliers, la fin de la guerre froide a induit une baisse des budgets de défense, la chute de l’Union soviétique a débouché sur la transition en Europe centrale et orientale. Mais l’équilibre des grandes puissances, qualifié d’hyperpuissance américaine de manière éphémère, et la polarisation de la Chine sur son développement économique ont longtemps été facteurs de stabilité. Les conflits sont restés localisés et contenus. Parallèlement, l’intégration de pays toujours plus nombreux dans la mondialisation, reflétée par l’augmentation continue du nombre de pays adhérents aux organisations multilatérales, l’envolée des échanges et une ouverture financière croissante ont pu donner l’illusion que l’interdépendance économique serait garante de stabilité géopolitique.

La période à venir ne sera certainement pas à cette image. L’affirmation de la puissance chinoise et les réactions qu’elle suscite, la monté des rivalités entre pouvoirs régionaux, le réveil militaire de la Russie, la multiplication des conflits au pourtour de l’Europe et l’extension du terrorisme signalent que les risques géopolitiques vont significativement peser sur les perspectives économiques dans les temps à venir.

Multiplication et intensification des conflits armés et du terrorisme

Depuis 2014, le monde connaît une multiplication et une intensification des conflits nationaux et internationaux. L’enlisement de la guerre en Syrie, les multiples offensives de l’État islamique au Moyen-Orient, en Afrique, la guerre civile au Soudan, les tensions en Ukraine, en Israël ou en Turquie, la reprise des conflits internes en Irak et en Afghanistan, l’hostilité croissante entre l’Iran et l’Arabie saoudite, les tensions en mer de Chine sont autant de sources d’instabilité géopolitique qui peuvent avoir des répercussions à l’échelle mondiale.

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Les crises géopolitiques sont d’abord des drames humains aux conséquences terribles qui dépassent largement les frontières des pays directement concernés. Mais elles affectent également l’économie mondiale à travers différents canaux. Les coûts les plus importants sont en premier lieu ceux que subissent les pays directement impliqués. Le reste du monde est affecté via les liens commerciaux et financiers avec ces pays. À l’échelle régionale, les flux migratoires déclenchés par les conflits constituent également un facteur de déstabilisation, d’abord pour les pays limitrophes puis sur un horizon géographique qui s’élargit, comme l’illustrent dramatiquement le conflit syrien et la crise des réfugiés en Europe. Parallèlement, la montée des risques appelle un réinvestissement dans la sécurité intérieure et extérieure, et des initiatives de stabilisation qui mobilisent des ressources importantes. Enfin l’intensification de la conflictualité au niveau mondial ou régional accroît l’incertitude et pèse ainsi sur la confiance et l’investissement.

Dans un tel contexte, la capacité collective à maintenir la stabilité mondiale sera fortement mise à l’épreuve. Alors que les États-Unis sont dans une phase de désengagement de leurs opérations extérieures, notamment au Moyen-Orient, ni les instances multilatérales ni l’Union européenne ne sont aujourd’hui en position d’exercer une gestion effective des crises.

L’érosion du consensus sur l’ouverture économique

2008-2009 constitue peut-être un point d’inflexion historique dans la phase d’expansion de la mondialisation économique qui avait caractérisé l’économie mondiale au cours des années 1980. Depuis la crise financière, le commerce mondial a cessé de progresser plus vite que le PIB mondial et les flux financiers transfrontières qui n’avaient cessé de croître se sont nettement repliés (graphique 15).

Du côté des flux commerciaux, la forte élasticité du commerce à la croissance observée avant la crise financière s’explique probablement par le phénomène de fragmentation croissante des chaînes de production et l’entrée dans l’économie mondiale d’un pays aussi important que la Chine. Si ces évolutions sont arrivées à maturité, le ralentissement du commerce mondial est logique et ne doit pas préoccuper. Quant à la phase de croissance rapide des flux financiers d’avant-crise, elle était sans aucun doute excessive et il est probable que les flux de capitaux observés aujourd’hui correspondent à une situation plus normale. Tant les travaux de recherche académiques que ceux menés par des institutions comme le FMI affirment aujourd’hui que les contrôles de capitaux sont un instrument légitime qu’il convient d’utiliser en complément de la politique monétaire. On ne peut donc pas attribuer l’inflexion observée dans les données à une interruption du processus de mondialisation.

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Il reste que le consensus autour de l’ouverture internationale s’érode. En témoignent la teneur des débats politiques dans plusieurs démocraties avancées (États- Unis, Royaume-Uni, France, Italie…) et la crise que traverse l’Union européenne. Dans de nombreux pays, des partis politiques remettent profondément en cause l’ouverture économique, financière et migratoire, perçue comme responsable du malaise social et identitaire.

Dans une phase de croissance molle, il est possible que des États fassent de plus en plus le choix de politiques économiques non coopératives en matière monétaire et de change (graphique 16), en matière financière, voire en matière commerciale. La déshérence de l’OMC ou l’effectivité réduite du G20, consacré en 2009 forum central de la coordination internationale, attestent des faiblesses de la gouvernance mondiale.

Force est de constater que la pérennité de l’équilibre politique et institutionnel sur lequel s’est fondée la croissance de l’après-guerre et des décennies récentes est devenue plus incertaine.

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30. La théorie de la stagnation séculaire est notamment débattue dans Secular Stagnation: Facts, Causes and Cures, ebook, VOXEu, 2014.

En ouverture au débat

Cinq conclusions se dégagent des analyses présentées dans cette note :

1. Il est prudent de ne pas tabler pour la décennie à venir sur un rebond important de la croissance mondiale. En raison du vieillissement, de l’endettement accumulé et de la faiblesse observée des gains de productivité, le redressement attendu dans les pays avancés sera a priori de faible ampleur et soumis à des aléas baissiers. De leur côté, les économies émergentes subiront un ralentissement significatif de leur croissance. Ce dernier devrait être au moins graduel, il pourrait être brutal. L’hypothèse centrale retenue ici pour 2017-2026 est un maintien de la croissance mondiale aux alentours de 3,5 %, comme dans la décennie 2007-2016.

2. Les politiques économiques vont devoir innover. La très médiocre performance économique des années 2007-2016 est principalement attribuable à des erreurs de politiques publiques qui ont été particulièrement pénalisantes en Europe. Dans la décennie à venir, gouvernements et banques centrales devront probablement faire face à des problèmes d’apparition récente : insuffisante diffusion de l’innovation et des gains de productivité, faiblesse de l’inflation et des taux d’intérêt réels, persistance d’un endettement public et privé élevé, déséquilibres entre épargne et investissement en raison d’une distribution des revenus favorable à la première et d’économie de capital défavorable au second. Les résultats économiques dépendront de la capacité des politiques économiques à innover pour affronter ces problèmes.

3. L’interaction entre économie et géopolitique sera plus intense qu’elle ne l’a été au cours des dernières décennies. Rivalités globales, crises régionales et mouvements d’opinion à l’encontre de l’ouverture économique sont de nature à affecter substantiellement les perspectives économiques et les priorités de la dépense publique.

4. Derrière ces tendances agrégées incertaines, des évolutions sectorielles contrastées se produiront : déclin de certaines industries (par exemple celles intensives en énergie fossile) ou de certains métiers (emplois routiniers et donc automatisables), essor ou renforcement de nouveaux secteurs (environnement, numérique, santé, éducation, services à la personne).

5. Plus que le niveau de la croissance future, sa soutenabilité et la distribution des revenus qu’elle induit seront des enjeux essentiels pour les prochaines années. En effet, la distribution de plus en plus inégale des fruits de la croissance depuis les années 1990 et le déterminisme social qui en découle sont générateurs de fortes tensions sociales et fragilisent la soutenabilité de la croissance. Cette question est d’autant plus complexe qu’elle doit être pensée au niveau national mais également international, notamment en termes de fiscalité (des individus comme des entreprises).

Deux points clefs pour les évolutions économiques et géopolitiques de la décennie 2017-2027 n’ont pas été abordés ici, ce qui confère un caractère provisoire à ces conclusions. Ils feront en effet l’objet d’analyses spécifiques publiées au printemps 2016 :

  • la transition écologique, ses modalités de mise en oeuvre et ses implications pour la croissance ;
  • l’avenir de l’Union européenne et de la zone euro qui aura des conséquences tant sur l’équilibre géopolitique que sur le contexte macroéconomique régional.

 

Une série de questions découle enfin des analyses proposées dans cette note.

Le lien entre politiques économiques et trajectoire macroéconomique

Faut-il repenser les politiques monétaires et surtout, budgétaires si perdure le contexte de faible inflation et de taux d’intérêt réels voisins de zéro ? Quelles réformes faut-il introduire, en Europe notamment, pour relancer durablement la productivité et l’emploi ?

La forte incertitude quant au rythme futur de la croissance

Faut-il donner priorité à des réformes qui ravivent le potentiel d’activité ou plutôt adapter le système économique et social à un nouvel environnement de très faible croissance ? Comment assurer la cohérence entre dépenses sociales et croissance potentielle ?

La qualité de la croissance

Comment conjuguer l’objectif de croissance économique avec les critères de soutenabilité environnementale et sociale, d’égalité des chances, d’inclusion sociale ?

L’avenir de la mondialisation

Doit-on continuer à promouvoir des accords commerciaux ? Faut-il prendre son parti du déclin du multilatéralisme et s’inscrire complètement dans une logique d’accords régionaux ? La coopération internationale est-elle à la hauteur des problèmes posés par les nouvelles formes d’interdépendance financière internationale ? Doit-on encourager la transition vers un système monétaire international multipolaire ?

Les conséquences économiques de l’insécurité régionale

Dans les dix ans qui viennent, quels moyens les pays Européens vont-ils devoir dégager pour stabiliser leur environnement régional et se prémunir contre les conséquences des tensions qui le traversent ? Quels canaux cet effort devra-t-il emprunter ? De quelle ampleur devra-t-il être ?

Les phénomènes migratoires

Conflits, désordres climatiques et déséquilibres économiques vont-ils déboucher sur un accroissement des flux migratoires internationaux, en particulier de réfugiés ? Quelles en seraient les conséquences économiques et sociales ? Quelle réponse l’Europe doit- elle leur apporter ?

Les institutions de la gouvernance mondiale

Renforcer la coordination à travers le G-20, est-ce la bonne option ? Quel avenir pour les institutions financières multilatérales ? Va-t-on vers une logique plus régionale ? Quels instruments développer pour lutter contre l’évasion fiscale ?

La sécurité internationale et le devenir des institutions héritées de 1945

La sécurité internationale va-t-elle se reconstruire autour d’un équilibre multipolaire ? Un tel équilibre peut-il être stable ?

Auteur : Arthur Sode

Annexe

2017-2026 : quelques repères quantitatifs

Les scénarios de croissance mondiale proposés en complément à la note La croissance mondiale d’une décennie à l’autre sont réalisés en deux temps :

  • une estimation de l’impact de divers éléments sur la croissance des économies avancées et des économies émergentes à l’horizon 2017-2026 ;
  • en fonction des taux de croissance estimés lors de cette première étape et des poids moyens respectifs dans le PIB mondial induits, une estimation de la contribution de chacun de ces éléments à l’évolution de la croissance mondiale entre les décennies 2007-2016 et 2017-2026.

Ces chiffrages ont pour objet de donner un ordre de grandeur à l’ampleur des différents facteurs susceptibles d’affecter les tendances de la croissance mondiale au cours de la prochaine décennie (graphique 1). Contrairement à ce qui se pratique le plus souvent, nous ne partons pas de projections pays par pays ou zone par zone mais d’une analyse globale. Cette méthode top-down a l’avantage de la transparence. Elle est aussi moins granulaire, donc inévitablement moins précise, qu’une approche bottom-up.

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Les économies avancées

L’hypothèse de départ est celle d’un retour des économies avancées à la tendance de croissance qui était la leur sur la décennie avant la crise financière de 2008, soit un surplus de croissance annuelle de 1,4 % (la croissance des économies avancées a été de 2,5 % sur la période 1997-2006, contre 1,1 % anticipé pour la décennie 2007-2016)[1]. De cette manière, nous définissons un scénario de base pour la croissance des économies avancées, à partir duquel nous envisageons l’impact de diverses évolutions structurelles anticipées.

L’effet du vieillissement

Alors que la croissance de l’emploi sur la décennie 1997-2006 a été de 0,9 % par an, elle devrait ralentir significativement sur la décennie 2017-2026. En particulier, la croissance de la population en âge de travailler (20-64 ans) qui était de 0,6 % sur 1997-2006 va stagner entre 2017 et 2026[2]. L’effet sur l’emploi sera en partie atténué par une hausse des taux de participation et d’emploi, notamment du fait de l’allongement de l’âge de départ à la retraite et de l’augmentation tendancielle des taux de participation des femmes[3]. Nous retenons une hypothèse de croissance de l’emploi sur 2017-2026 de 0,2 % par an[4]. À croissance constante de la productivité globale des facteurs (PGF) et des stocks de capital[5], et en prenant une part de la compensation du facteur travail de 2/3, on en déduit, à partir d’une fonction de production Cobb-Douglas standard, que le vieillissement se traduirait par un moindre apport à la croissance des économies avancées estimé à 0,5 % par an (par rapport à une hypothèse de retour à une croissance tendancielle de 2,5 %). En plus de cet effet direct du vieillissement sur le PIB, nous estimons que l’accroissement de l’âge moyen des actifs sur la décennie 2017-2026 devrait réduire la productivité globale des facteurs[6]. Alors qu’il existe un débat dans la littérature sur l’ampleur de cet effet, nous estimons ce ralentissement de la PGF, donc de la croissance, à 0,1 point sur 2017-2026, portant à 0,6 point de croissance le coût total du vieillissement.

L’effet de l’endettement

Les niveaux d’endettement total non financier, c’est-à-dire des ménages, des entreprises et du secteur public, ont augmenté de plus 60 points de PIB dans l’ensemble des économies avancées depuis 2000. Les études empiriques estiment que les économies combinant des niveaux d’endettement public et privé très élevés pourraient perdre jusqu’à 1 % de croissance par an[7]. De même, Chen et al. (2015) montrent qu’un désendettement de 10 points de PIB du secteur privé induit une perte de croissance annuelle de 0,4 % pendant cinq ans[8]. Compte tenu de la forte incertitude vis-à-vis de ces estimations, de l’hétérogénéité des situations en termes d’endettement dans les économies avancées (certains pays comme les États-Unis ou le Royaume-Uni ayant réduit une partie non négligeable de leur endettement privé) mais aussi du fait que les taux d’intérêt sont très bas et facilitent le désendettement[9], nous retenons un impact sur la croissance moins significatif pour l’ensemble des économies avancées qui se monte à 0,2-0,3 % de croissance annuelle.

L’effet des inégalités

Alors que l’indice de Gini qui mesure le degré d’inégalités sur l’ensemble de la distribution des revenus s’est presque partout accru depuis les années 1990, plusieurs études empiriques récentes concluent à un effet négatif et non négligeable du niveau des inégalités et de leur accroissement sur les taux de croissance du PIB. À partir d’une étude récente de l’OCDE[10], nous extrapolons un coût des inégalités pour l’ensemble des économies avancées de 0,2 % en termes de croissance annuelle. Certes les niveaux d’inégalité étaient déjà élevés sur la décennie antérieure à la crise de 2008 mais on peut penser que le coût en points de croissance a été à l’époque neutralisé par la bulle financière globale qui a caractérisé cette période. Ainsi le 0,2 % doit bien être retranché du scénario initial de retour à la tendance d’avant-crise. L’addition de ces différents éléments conduit à une croissance de l’ordre de 1,5 % par an sur la décennie 2017-2027. À partir de ce scénario central, on peut considérer deux scénarios où des aléas positifs ou négatifs viennent s’ajouter (tableau 1). Dans le scénario pessimiste, les deux aléas négatifs considérés sont :

  • le ralentissement de la productivité ;
  • la possibilité d’avoir une épargne excédentaire persistante (scénario de « stagnation séculaire »).

La croissance de la productivité par personne employée des économies avancées est passée de 1,7 % par an sur la décennie 1997-2006 à 0,8 % entre 2007 et 2015. Nous retenons ici une hypothèse d’un moindre apport à la croissance de 0,5 point par an[11]. Un excès durable de l’épargne mondiale se traduisant par un taux d’intérêt d’équilibre significativement négatif affecterait la croissance du PIB par le canal d’une faiblesse de l’investissement et d’une insuffisance récurrente de la demande globale. Cela s’accompagnerait du maintien d’une sous-utilisation des facteurs de production et notamment du travail (chômage, sous-activité). En l’absence de chiffrage convaincant dans la littérature sur ce point, nous retenons un effet de réduction de la croissance annuelle du PIB de l’ordre de 0,5 point sur la décennie. Dans le scénario plus optimiste, nous considérons au contraire un aléa positif sur la productivité, qui correspond au type de prédiction des techno-optimistes, sans effet récessif d’un excès d’épargne durable. De manière symétrique à l’aléa négatif de productivité, nous retenons un surplus de de l’ordre de 0,5 point de croissance annuelle pour les économies avancées sur la période 2017-2026[12].

17-27-Croissance_mondiale---Annexe---Tableau_Plan-de-travail-1Les économies émergentes

Le scénario initial de croissance de ces économies sur lequel nous apportons des modifications est celui du maintien d’un taux de croissance à sa valeur des deux dernières décennies, c’est-à-dire à 5,5 %. Nous estimons toutefois que la croissance de cet ensemble de pays sera réduite significativement (tableau 2) :

  • par le ralentissement important de l’économie chinoise du fait de la réorientation structurelle de son modèle de croissance ;
  • par le retournement du cycle financier positif qu’ont traversé les économies émergentes depuis 2009 ;
  • par la fin du super-cycle des matières premières.

Pour estimer l’effet de ce ralentissement, nous comparons la croissance des économies émergentes sur les deux dernières décennies à celle des années 2014 et 2015 où la situation à commencer à se modifier (notamment en raison de la baisse du prix des matières premières dès la mi-2014 et du durcissement des conditions monétaires qui ont anticipé les premières remontées de taux décidées par la Fed). La croissance moyenne sur 2014-2015 n’a été que de 4,2 % contre 5,5 % entre 1995 et 2013. Notre hypothèse est que ce ralentissement observé sur ces deux années est durable. Nous retenons donc une croissance moyenne sur la décennie 2017-2026 de 4,5 % par an (soit 1 point de moins que lors de la décennie précédente).

Dans le scénario pessimiste, nous prenons en compte un aléa négatif où certaines économies émergentes tombent dans une trappe à revenu intermédiaire et connaissent un ralentissement de leur croissance encore plus important. Nous retenons une baisse supplémentaire de croissance de 2 points par an (critère d’identification de tels épisodes choisi dans la littérature) pour les pays situés dans l’intervalle de revenu compris entre 10 000 et 15 000 dollars PPA (parité de pouvoir d’achat) et qui ont connu une croissance supérieure à 4 % sur la décennie précédente[13]. Au vu du poids de ces économies dans le PIB des économies émergentes, ceci correspond à une perte de croissance de l’ordre de 0,7 point supplémentaire. À l’inverse, nous considérons un scénario optimiste où il n’y a pas de trappe à revenu intermédiaire et où la croissance ne se réduit que de 0,5 point par an.

 17-27-Croissance_mondiale---Annexe---Tableau_Plan-de-travail-2

Scénarios pour la croissance mondiale

À partir de ces hypothèses sur les taux de croissance futurs des économies avancées et émergentes, il est possible de chiffrer deux scénarios d’évolution de la croissance mondiale pour la décennie 2017-2026. Pour cela, il est nécessaire d’évaluer le poids moyen de chaque groupe de pays dans le PIB mondial sur la période. Le tableau 3 montre que ce poids moyen varie très peu d’un scénario à l’autre.

 17-27-Croissance_mondiale---Annexe---Tableau_Plan-de-travail-3

Pour estimer la contribution des économies émergentes à la croissance mondiale, il est d’abord nécessaire de prendre en compte le surplus de contribution induit par une croissance qui se maintiendrait à 5,5 %. En effet, le poids des émergents étant plus important sur la décennie 2017-2026, un maintien de la croissance à 5,5 % par an induirait un surplus de croissance de 0,5 % pour l’économie mondiale. C’est sur cette base que nous déduisons les divers éléments décrits dans la partie précédente. Le tableau 4 présente les contributions à la croissance mondiale.

17-27-Croissance_mondiale---Annexe---Tableau_Plan-de-travail-4

1. Les chiffres retenus pour la décennie 2007-2016 reprennent les prévisions du FMI pour les années 2015 et 2016 (mise à jour du World Economic Outlook, janvier 2016).

2. Source : « Perspectives démographiques mondiales », ONU.

3. À l’inverse, le vieillissement joue négativement sur le taux de participation en accroissant la part des cohortes les plus âgées dont les taux de participation sont plus faibles.

4. L’atténuation de l’effet démographie sur l’emploi induite par l’augmentation des taux de participation et d’emploi est légèrement inférieure à celle évaluée par l’Ageing Working Group dont certaines hypothèses de convergence des taux d’emploi sur le début de la période de projection nous paraissent surévaluées.

5. Ceci suppose une croissance continue du ratio capital-travail et donc une forme de substitution du capital au travail qui s’expliquerait par la rareté croissante de ce dernier.

6. Aubert P. et Crépon B. (2004), « La productivité des salariés âgés : une tentative d’estimation », Économie et Statistique, n° 368, avril ; Feyrer J. (2007), “Demographics and Productivity”, Review of Economics and Statistics, February ; Werding M. (2008), “Ageing and Productivity Growth: Are There Macro-level Cohort Effects of Human Capital?”, CESifo Working Paper, January 30.

7. Cechetti et al. (2011) estiment que les seuils au-delà desquels l’endettement réduit la croissance sont 85 % du PIB pour la dette publique, 90 % pour les entreprises et 85 % pour les ménages. Au-delà de ce seuil, toute hausse de l’endettement public de 10 points de PIB réduirait la croissance de 0,2 point par an. Bornhorst et al. (2013) montrent qu’un endettement élevé dans plusieurs secteurs simultanément démultiplie l’effet négatif sur la croissance. Voir Cecchetti S.G., Mohanty M.S. et Zampolli F. (2011),“The Real Effects of Debt”, BIS Working Papers 352 ; Bornhorst F. et Ruiz-Arranz M. (2013), “The Perils of Private-Sector Deleveraging in the Eurozone”, November 10, VOX CEPR’s Policy Portal.

8. Chen S., Kim M., Otte M., Wiseman K. et Zdzienicka A. (2015), “Private Sector Deleveraging and Growth Following Busts”, IMF Working Paper WP/15/35, February.

9. À l’inverse, la faiblesse de l’inflation et de la croissance complique d’autant plus le désendettement.

10. Cingano F. (2014), “Trends in Income Inequality and its Impact on Economic Growth”, OECD Social, Employment and Migration Working Papers No 163.

11. C’est l’ordre de grandeur du ralentissement de la productivité horaire prévu pour les États-Unis par Gordon R.J. (2014), “The Demise of U.S. Economic Growth: Restatement, Rebuttal, and Reflections”, NBER Working Papers No. 19895, February.

12. Bartelsmann estime possible d’atteindre une croissance de la productivité horaire de l’ordre de 2,5 % sur les 20-30 prochaines années ; voir Bartelsman E.J. (2013), “ICT, Reallocation and Productivity”, Economic Papers 486, April, European Commission.

13. Nous retenons l’Indonésie, la Chine, l’Égypte et la Colombie. D’autres pays, comme le Brésil ou l’Afrique du Sud, qui appartiennent à l’intervalle de revenu choisi ont des croissances moyennes déjà faibles sur la décennie 2007-2016. Voir Eichengreen B., Park D. et Shin K. (2013), “Growth Slowdowns Redux: New Evidence on the Middle-Income Trap”, NBER Working Papers No 18673.

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Toutes les parties prenantes au débat public sont invitées à s’exprimer, à confronter leurs constats au diagnostic élaboré par les experts de France Stratégie, à présenter leurs analyses et à formuler des propositions. DÉPOSEZ VOTRE CONTRIBUTION AVANT LE 22 AVRIL 2016. 

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Le débat Géopolitique

Mercredi 26 avril 2016

Réécoutez le débat : La croissance mondiale d’une décennie à l’autre : des interactions croissantes entre économie et géopolitique

La réflexion sur les perspectives économiques ne consacre généralement pas beaucoup d’attention aux facteurs géopolitiques. L’intégration de pays toujours plus nombreux dans la mondialisation, reflétée par l’augmentation continue du nombre de pays adhérents aux organisations multilatérales, l’envolée des échanges et une ouverture financière croissante ont pu donner l’illusion que l’interdépendance économique serait garante de stabilité géopolitique. Toutefois, la période à venir ne sera certainement pas à cette image. L’affirmation de la puissance chinoise et les réactions qu’elle suscite, la monté des rivalités entre pouvoirs régionaux, le réveil militaire de la Russie, la multiplication des conflits au pourtour de l’Europe , le pivot géostratégique américain vers l’Asie et l’extension du terrorisme signalent que les risques géopolitiques vont significativement peser sur les perspectives économiques dans les temps à venir.

Avec les interventions de :

Nicole GNESOTTO
Nicole Gnesotto a exercé au Centre d’analyse et de prévision du Ministère français des Affaires étrangères et dirigé l’Institut d’études de sécurité de l’UEO de 1999 à 2001, avantd’être nommée premier directeur de l’Institut d’études de sécurité de l’Union européenne (EU-ISS) jusqu’en 2007. En 2008, elle a été nommée professeur titulaire de la chaire sur l’Union européenne au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM). Nicole Gnesotto préside depuis 2015 le conseil d’administration de l’Institut national des hautes études de défense nationale (IHEDN). Derniers ouvrages parus : L’Europe a-t-elle un avenir stratégique ?, Armand Colin, février 2011;Faut-il enterrer la défense européenne ?, La Documentation française, mai 2014.

Mark LEONARD
Mark Leonard est cofondateur et directeur exécutif de l’European Council on Foreign Relations. Il a précédemment travaillé au Centre for European Reformet a dirigé le Foreign Policy Centre, un think-tank qu’il a fondé, sous le patronage de Tony Blair. Mark Leonard exercé à Washington en tant que Transatlantic fellow au German Marshall Fund of the United States et à Pékin en tant que chercheur invité à l’Académie chinoise des sciences sociales. Son premier livre, Pourquoi l’Europe dominera le XXIème siècle ?, publié en février 2006, a été traduit en 19 langues et son deuxième livre, Que pense la Chine ?, a été publié en février 2008.

Dominique MOÏSI
Dominique Moïsi est géopoliticien, conseiller spécial à l’Institut français des relations internationales, dont il est membre fondateur. Visiting professorà Harvard puis au King’s College de Londres, il est également éditorialiste pour le Financial Times, Les Échos et Ouest-France. Dominique Moïsi a publié, entre autres, La Géopolitique de l’émotion, traduit en 26 langues. Dernier ouvrage paru : La géopolitique des séries ou le triomphe de la peur, Stock, janvier 2016.

Mercredi 26 avril 2016 de 17h30 à 20h à France Stratégie

Contributions

1. Euro Area Economic Watch: Where has everybody gone? – Gilles Moec – Chef économiste Europe – Bank of America
– We look at the decline in labour supply, in both the US and the Euro area. – In the US, labour supply is likely to stay markedly below the pre-2008 pace, with risks of an actual fall in Europe – In Europe, we think structural reforms alone can’t do the trick. A major stimulus to work through the slack is then needed.

2. Contribution citoyenne – André Dall’Agnol
Faut-il repenser les politiques monétaires et surtout, budgétaires si perdure le contexte de faible inflation et de taux d’intérêt réels voisins de zéro ? Quelles réformes faut-il introduire, en Europe notamment, pour relancer durablement la productivité et l’emploi ?

3. La croissance européenne passera par la croissance africaine – IPEMED (Institut de prospective économique du monde méditerranéen)
Envisager une croissance mondiale à long terme relève, au-delà des questions strictement économiques, d’une stabilisation du contexte géopolitique. Dès lors, il est urgent, à côté des questions sécuritaires, de faire des propositions en matière de développement et d’intégration économique entre des grandes régions, et, en particulier, entre le Nord et le Sud.

4. Contribution citoyenne – Jean-Claude Devèze
Notre contribution vise à critiquer une démarche amorcée sous un angle « tout est d’abord économique », même si les préoccupations sur les facteurs géopolitiques ont été rappelées et si le débat a confirmé que le politique a toute sa place : nécessité d’une coordination des politiques économiques européennes, réorientation de l’épargne vers l’investissement, etc.

 

Le débat Croissance mondiale

Jeudi 3 mars 2016

Suite à la présentation du projet « 2017/2027 », le jeudi 3 mars 2016, un échange a été organisé sur la première note « La croissance mondiale d’une décennie à l’autre ».

Gilbert Cette, adjoint au directeur général des études et des relations internationales de la Banque de France et Gilles Moec, chef économiste Europe de Bank of America, ont notamment discuté les constats et questions posées par Arthur Sode, auteur du document.

La présentation de Gilbert Cette

La présentation de Gilles Moec

Appel à contribution
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Toutes les parties prenantes au débat public sont invitées à s’exprimer, à confronter leurs constats au diagnostic élaboré par les experts de France Stratégie, à présenter leurs analyses et à formuler des propositions. DÉPOSEZ VOTRE CONTRIBUTION AVANT LE 22 AVRIL 2016. 

Qui peut contribuer ? Comment contribuer ?  Comment promouvoir votre contribution ? Toutes les conditions disponibles ici.

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